C'est tout de même hallucinant de constater à quel point tout ce que j'ai subi est systémique, l'ampleur des expériences similaires, avec les mêmes ressorts.
CE QUE JE VOUDRAIS
Avoir une activité indépendante. Mon cabinet, mes horaires, mes rendez-vous, point. Choisir qui, choisir où, choisir comment. Mettre à profit mes expériences en gestion pour moi, strictement pour moi. Arrêter d'être au service gratuit des autres. Les gens ne respectent que ce pour quoi ils payent. Tu peux le déplorer ou voir le monde tel qu'il est. Ce que je veux, c'est être placée en congé longue maladie. Je ne veux pas retourner travailler à EWING, je ne veux plus entendre parler de cette école. Je ne veux plus être en présence de cette équipe dangereuse mais je ne veux plus non plus entendre parler de grands projets, de lien avec le périscolaire ou de toutes les actions qui sont faites plus par habitude que par conviction. Je ne veux plus avoir un emploi du temps en forme de guryère industriel, des trous partout, et moi qui doit compter que les doigts d'une main le temps que je passe avec mes élèves. Du coup tout le travail se fait avec le chronomètre en poche, dans l'urgence parce qu'il y a l'intervenante musique, plus l'intervenant sécurité routière, plus toutes les autres perturbations qui font que je me retrouve à n'être plus qu'une simple touriste dans ma classe. Et que dire de celle qui complète ma décharge qui prend l'initiative de déplacer les meubles alors que ça fait seulement quinze jours que je suis arrêtée ?
Je ne veux plus “gérer” des projets. On ne gère rien en fait, on fait le travail à la place des autres. On est accessoirement le passe-plat ou le paillasson. Je vois d'ici les remarques de certains lecteurs : voilà encore un jaune qui dénigre la profession alors qu'on a déjà assez à faire avec les insultes des parents. Mais moi, tout ça, ça me rend malade ! Le pas de vagues, le fameux pas de vagues dont on dit qu'il est exigé par la hiérarchie, il est tout autant porté comme un étendard par la masse des lâches et des hypocrites qui pullulent dans les cours de récréation et qui se comportent comme les pires ordures. J'entendais encore hier un psychiatre qui exhortait les enseignants à mettre en place des cours d'empathie dans les écoles avec des conseils de classe et de la communication non violente. Déjà, d'une, en ce qui me concerne, je n'avais pas attendu les injonctions pour le mettre en place mais de deux ce ne sont pas les enfants qui posent majoritairement problème, ce sont les adultes ! C'est aux adultes qu'il faudrait donner des cours d'empathie ! Les instit's adjoints en auraient grand besoin à l'endroit de ceux qui se fadent la direction des écoles. Ou peut-être qu'il faudrait les obliger, manu militari, à exercer la direction d'une école pendant minimum un an. Toutes ces pimbêches donneuses de leçon parce qu'elles ont eu la compétence suprême de pouvoir ejecter un chiard de leur utérus !
Je veux passer sous les radars. C'était ma stratégie au début, faire la béni oui oui et, une fois les caméras parties, reprendre le cours normal des choses. J'en ai tellement marre de partager ma classe avec les autres, d'être un fantoche. J'en ai marre de voir l'école se transformer en un gloubi boulga de lubies qui n'ont pas de sens. Le centre de loisirs avant chaque petites vacances, participer à une course à pied le weekend, faire des journées déguisées pour le carnaval, aller faire les cours de maths dans la pelouse du parc d'à côté, préparer un spectacle, le marché de Noël, la fête des mères, aller au cinéma, au théâtre, partir en séjour de trois jours au printemps théâtral avec 28 gamins de six juste parce qu'on ne supporte pas de rester dans les locaux. Mais quand est-ce qu'on enseigne ?! Moi, au milieu de tout ça, à persister à vouloir faire des maths et du français, à penser que, s'il doit y avoir heures sup' ça doit être pour des recherches pédagogiques pour tel ou tel élève qui a besoin d'accompagnement particulier ou ça devrait être pour construire des outils communs pour les élèves neuro-atypiques par exemple, je passe pour un dinosaure. La grande idée de l'année, c'est de créer une giga classe réunissant deux classes, avec les deux instits qui se partagent les matières comme au collège et qui font les cours de français en duo avec 48 gamins de 7 et 8 ans devant eux.
Non, franchement, on crache sur la hiérarchie, à raison parce qu'on a à faire à un ramassis de larves et de pleutres mais il y a un petit paquet d'instits qui sont vraiment hors-sol. En tout cas, moi, il m'ont foutu le bordel dans mes idéaux. Le travail d'équipe, mon cul oui. Mais chut, il ne faut pas le dire. Les instits sont déjà assez dénigrés par les parents, il ne faudrait pas en rajouter. En attendant, quand on regarde les enquêtes, il n'y en a que pour le secondaire. La violence à l'école primaire, ça n'existe pas. La violence entre les enseignants, ça n'existe pas et vu que les directeurs sont toujours vus commes les supots de la hiérarchie, comme des “petits chefs”, ce sont toujours eux les rats et du coup le harcèlement des adjoints sur les directeurs, ça n'existe pas non plus. Que des responsabilités, aucune autorité. Mais il faut vraiment être débile pour accepter de faire ça au milieu d'un corps de métier qui n'accepte pas la hiérarchie, qui a un rapport à la hiérarchie de gamins. Tu m'étonnes ! Qui d'entre-eux est sorti de l'école, a fait autre chose ? Pour ceux d'entre-nous qui viennent du privé, on hallucine. Cette obéissance crasse de premier de la classe.
Ho, j'en ai des choses à dire et je vois bien que ça commence à m'énerver, que ça me fait monter l'envie de fumer mais merde ! Ce n'est pas à moi d'avoir honte bordel ! Et si je dois faire autre chose et bien je le ferai. Non mais ! Ca va bien, pour qui doit-on accepter de se voir soi-même comme la dernière des merdes ?! Pour eux là, ces espèces de saloperies, de lâches ? Non mais attends, moi je ne veux pas être animatrice de centre de loisirs, malgré tout le respect que j'ai pour eux. Moi je ne veux pas être la secrétaire, le bouche-trou, le fusible ! Non mais on va où là ? Nom de Dieu ! J'ai deux Master avec mention dont un master archéologie mention très bien. J'ai réussi absolument tous les projets que j'ai entrepris que ce soit professionnellement ou personnellement. J'ai du lutter, batailler, j'ai mis un pied, un genou, le ventre parfois le corps entier au sol, je suis restée gisante, là, au milieu de la route, battue par la tempête. Je me suis relevée, à chaque fois. J'ai une capacité d'apprentissage hors-normes, je pourrais tout faire. J'ai des capacités intellectuelles supérieures à la norme et il faudrait que je me laisse dicter ma conduite par ce ramassis d'amibes mono-cellulaires ? Putain, j'ai accepté tout ça pour les enfants, parce que je pensais être utile. Il y a plein de façons d'être utile. La première c'est être utile pour soi et pour les gens qu'on aime. Ma vie ne s'arrête pas à la porte de la salle de classe.
Je m'en fous de mes cotisations retraites. Je me fous de mon avancement, je me fous des possessions matérielles. La plupart du temps, il s'agit de s'endormir l'esprit pour aller compenser le vide abyssale dans lequel on se trouve. Je me fous de tout ça, on vendra s'il le faut. On s'en fout tellement. Le travail est un moyen pas une fin. Je veux quitter cette école, je veux quitter la circonscription, je veux quitter la direction. Je ne veux plus partager ma classe, je ne veux plus avoir des responsabilités de gestion. La seule situation qui me fera encore accepter des gestions, c'est en ayant mon activité en indépendante, point.
Ce qui me plairait ? Travailler avec les animaux, au grand air, à l'extérieur, comme quand j'étais archéologue. Le terrain, la terre. C'est surtout le fait d'être indépendante, d'avoir ma propre activité, d'avoir mes propres horaires, de gérer les choses sans supérieur hiérarchique. Ca me fait rire parce que je conspue les enseignants qui ne supportent aucun lien hiérarchique mais moi non plus en fait. C'est pas vrai, moi j'ai toujours accepté l'autorité à partir du moment où elle était légitime. Je crois beaucoup au mérite, ou du moins j'y croyais et, pour moi, quelqu'un qui avait un poste avec une autorité hiérarchique le méritait, donc ça devait être quelqu'un de plus équipé, de meilleur que moi. La réalité m'a montré que ce n'est pas le cas. En tout cas, à l'Education Nationale où personne n'est formé sur rien, les gens qui montent les échelons le font par concours de celui qui sera le plus conforme à ce qui est attendu et donc sélectionné par des gens hors sol qui perpétuent cette belle tradition de mettre à des postes de RH des gens absolument pas formés pour. Ah si, ils ont peut-être regardé un ou deux tutos sur YouTube.
Rien n'a de sens dans cette boutique alors soit je repars “à zéro”, au plus simple dans ma classe avec ma petite pédagogique Freinet, canadienne et compagnie, soit je me casse, je pense à autre chose et je vois pour construire mon activité en FreeLance et demander une disponibilité ou un cumul d'activité et je me spécialiserai là où je voulais aller dès le début à savoir les enfants neuro-atypiques. Moi je ne suis pas pédopsy, je ne suis pas assistante sociale, je ne suis pas formée pour ça et je ne veux pas m'en soucier dans le cadre d'une actitivité indépendante. Je serai coach pour enfants. C'est tout. Les adultes m'emmerdent. Les gens de mon âge m'emmerdent en fait, depuis toujours. Je trouve les gens particulièrement débiles et pleutres. Je me suis embourgeoisée aussi et je me suis mise à avoir peur de choses dont, avant je n'avais strictement rien à foutre.
Ce qui est certain c'est qu'il est hors de question que je retourne dans cette école. Je me fous de perdre du salaire et je me fous royalement de passer en commission médicale.
ETAPE 1 : Faire les démarches pour la mutuelle
ETAPE 2 : Faire prolonger son arrêt le 9 février (rappel : le droit à un CMO est de un an donc pas de panique, personne ne peut t'obliger à y retourner)
ETAPE 3 : Participer au mouvement et ne pas se limiter à Laennec. S'il faut racheter une voiture, tu rachèteras une voiture. Oui, tu gagneras moins d'argent et bien tu dépenseras moins en conneries diverses et tu t'adapteras, c'est tout. Est-ce que l'argent que tu as gagné avec la direction, les objets que tu t'es acheté (et surtout les paquets de clopes et les pintes de bières) t'ont prémunie de la dépression ? Tu t'es rendue dépendante à des paliatifs que tu as eu peur de lâcher alors regagne ta liberté. La liberté se paye et toi, c'est ta valeur numéro 1 alors arrête de renoncer à qui tu es vraiment. A doit faire son propre chemin par rapport à ses propres contradictions. Ton rôle n'est pas de porter tout le monde à bout de bras. Tu dois être complète, toi avec toi. S'adapter ne veut pas dire se nier. Tu dois avoir deux priorités et tu dois les jouer : quitter la direction, quitter la circonscription.
ETAPE 4 : Si ça ne fonctionne pas, tu feras des démarches avec un psychiatre pour un CMO. Tu débloqueras la case “reconversion”, tu feras les démarches vers ergo-grapho-thérapeuthe / coaching pour enfants, tu passeras la certification pour l'anglais, tu feras feu de tous bois, tu t'investiras dans le fait de créer ton activité (digital nomade, trucs en téléconsultation) et tu investiras ton énergie dans la demande de disponibilité, voire de cumul d'activité. Et tu te donneras deux ans.